Aucun pont en vue

J'ai eu la chance d'assister jeudi soir dernier à la pièce Vu du pont de Arthur Miller. J'y allais avec l'espoir naïf d'apercevoir et d'admirer le pont de Brooklyn, le tout de mon siège perché au balcon. Je suis resté sur ma faim. C'est le moins qu'on puisse dire.

Les rares fois où les acteurs quittaient l'appartement de Union street, c'était pour aller prendre une marche au bord de l'eau. Mais les spectateurs n'avaient jamais le privilège d'être témoins de ces promenades. Nous étions malheureusement tous confinés à l'appartement. On ne pouvait que s'imaginer le mythique pont.

Parmi les répliques des acteurs, jamais une du genre "Je m'en vais prendre une marche sur le pont." ou "Je m'en vais prendre une marche au bord de l'eau pour admirer le pont." Je ne sais pas si la faute est à Arthur Miller ou à Lorraine Pintal, mais on tombe de haut lorsque l'on réserve son jeudi soir pour observer un pont qui ne se présente pas.

Si j'avais été plus attentif, j'aurais peut-être évité cette déception. Après tout, la pièce s'intitule bel et bien Vu du pont et non Vue sur le pont. N'empêche, il me semble que les spectateurs devraient être avisés de ces subtilités avant d'acheter leur billet.

En tout cas, je n'oublierai pas de sitôt cette pièce, ainsi que le magnifique jeu des acteurs, qui ont tous de manière consciente ou inconsciente, passé complètement sous silence l'existence du pont, qui, non loin de là, épiait peut-être leurs moindres faits et gestes.