2. Le départ
- Vtunes
- 10 nov. 2018
- 2 min de lecture
Chers collègues, je ne vais pas relever de nouveaux défis et je n’ai pas fait le tour du jardin. Mais je quitte mes fonctions définitivement. Ça veut dire pour toujours. Ma décision est longuement mûrie et irréversible.
« Tu t’en vas? »
« Définitivement. »
Pourquoi je quitte et quels sont mes projets d’avenir ne regarde personne. Si j’en parle, c’est tout simplement car j’en ai envie. Je mijotais ça depuis longtemps. J’ai décidé de me consacrer à l’amour à temps plein. Vous avez bien lu.
Je sais que je vais néanmoins manquer de temps et c’est pourquoi je ne peux pas passer une seconde de plus au bureau. L’amour est le sentiment le plus noble. Mais c’est beaucoup plus qu’un sentiment. C’est un mode de vie. C’est mon mode de vie.
J’entends déjà les commentaires.
« Il a écrit qu’il partait pour se consacrer à l’amour à temps plein. Tu crois ça? »
C’est bien que ce que j’ai écrit. Le plus dur à croire, c’est que j’aie attendu aussi longtemps avant de faire le saut. L’amour engage le corps et l’esprit de manière irrésistible et ne doit pas subir d’entraves sous aucune forme. Le vivre pleinement relève de notre état naturel. On doit tout lui sacrifier.
La primauté de l’amour sera ma grande révélation. Mon nouveau guide de conduite. Ma religion. Aimer du matin jusqu’au soir, sans interruption. Aimer en dormant. Aimer en rêvant. Aimer au réveil. Aimer à l’unisson. Aimer à perte de vue. Aimer à chaque souffle. Lentement. Sûrement.
« Mais tu t’imagines si tout le monde faisait ça? Ce serait le chaos. »
J’ai une fée à impressionner et je ne peux pas me soucier de ce que les autres vont faire ou devraient faire. Depuis la première impression, qui était bonne, nous vivons un perpétuel crescendo. Je veux poursuivre l’ascension.
Fini les interruptions! Les aléas du travail. Les atermoiements. Les rendez-vous manqués. Maintenant, il n’y aura que nous.
Je laisse mon bureau comme je l’ai trouvé il y a vingt ans. Sans lumière et sans plantes. Je m’en vais en chantonnant une version électronique germanique de « Tom’s Dinner » de Suzanne Vega. Je danse.
Je quitte par les escaliers. C’était ma marque de commerce. Adieu chers collègues. Je me sens déjà mieux. Léger. Libre. Ludique. Lyrique.
Je ne vais pas seulement vivre l’amour à temps plein. Je vais l’écrire. Jusqu’à l’apothéose. Et après, je vais recommencer. Jusqu’au début de l’histoire.

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